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Autres Perspectives
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30 janvier 2015

Sortie de crise !

Un semblant d'impasse                Suite de l'article : Reprendre la plume du 25/01/2015

ancien-nouveau-personnificationPar ses nombreux signes alarmants, le monde contemporain nous déroute. Face à la situation actuelle, dans un environnement où les repères deviennent plus flous, deux grandes  tendances s’affrontent au delà desquelles aucune alternative semble possible. L'une qui entend refuser la modernité dans sa globalité et justifier des solutions violentes, l'autre proposant une fuite en avant technologique et attendre de cette dernière une résolution de tous les problèmes, dans un univers complexe qu’il suffirait de réguler.

Quoi qu'il en soit, les déséquilibres augmentent, les injustices, les tensions ; la violence semble devoir prendre définitivement le dessus.

De la révolution violente à la mutation pacifique : mouvement de Personnification

flickr-lieven-soete-ccLe 20e siècle nous a montré que les solutions ne peuvent cependant se concevoir en terme d’appels collectifs selon des idéologies qui réduisent immanquablement l’homme à des modèles auxquels il doit se soumettre. L’Evolution suppose l’acceptation d’une totale liberté de la personne dans ce qu’elle est, et ce qu’elle est appelée à devenir. Aucun modèle ne peut la réduire. C'est ce que certains, comme Pierre Rabhi évoque lorsqu'il parle de sa foi en « l'inventivité  de la société civile ».

Le droit international, le respect de la personne et de ses droits fondamentaux vont dans le sens de cette Evolution. A ce stade, au moment où les défis se font de plus en plus pressants, c’est la définition même de l’Homme qui est en question et à laquelle il faudra se confronter.

Un avenir à visage humain suppose la reconnaissance inconditionnelle de  la Personne ; parce que l’individu est libre, parce qu’il garde une part de mystère inaccessible, il n’est pas soumis irrémédiablement à son environnement, ni manipulable à volonté.

flickr-pierre-lognoul-ccLa dégradation du monde, ce côté obscur mêlé à son potentiel de croissance vient d’un état de désunion au cœur même des personnes : désunion entre les actes, la conscience et les paroles. Les révolutions violentes externalisent le problème et bien souvent, ceux-là mêmes qui appelent à une révolution violente nient leurs propres contradictions.

Nous rejoignons ici la pensée de Teilhard de Chardin qui, dès le début du siècle, prévoyait ce qui attendait l’humanité et parlait de la nécessité imminente d’aller vers une « conscience véritablement adulte majeure ». Ce mouvement qui permet à chacun d'aller vers ce qu'il est, vers un « plus-être ».

Le plus-être n'est pas comparatif (« être plus que ») mais il définit un état de la personne plus unifié, en lien avec son essence, ce qu'elle est vraiment. C'est ce que Theilhard de Chardin appelait « le mouvement de Personnification »

flickr-james-crldland-crowd-ccCe mouvement n'est pas la résultante d'une gymnastique personnelle, ni de recettes ou de méthodes, mais accompagne l'évolution du monde. Certes, les résistances existent, mais l'histoire avance inexorablement : dès 1920, Theilhard (qui n'était pas un illuminé) entrevoyait l'imminence d'une interconnexion plus dense entre les êtres et devinait que cette interconnexion irait de pair avec une prise de conscience de l'appartenance à une humanité commune. Densité des interrelations qui  permettrait d'accéder à une meilleure connaissance de soi... L'autre, comme un miroir mais dans sa différence.

flickr-philippe-leroyer-nepal-cc

La Personnification est en effet à l'antipode de l'individualisme ou de visions sectaires où l'individu n'existe plus et se fond dans la masse.

Le chemin de Personnification :  une exigence et un point de passage obligé

Pas d'autre voie pour la vie !

flickr-luc-de-leeuw-cc

Les choix de société et technologiques, les réponses aux dysfonctionnements ne sont pas d'abord des résultantes de programmes et de plans. Ils proviennent de cette élévation de la conscience. Celle-ci débouche, par de multiples actes de la vie de chacun, et sans exclusion, sur des changements d'orientation qui font basculer peu à peu les choix collectifs.

flickr-jennifer-leonard-ccCe schéma ne va pas dans le sens du désengagement du monde. Au contraire, par son degré d'exigence qui appelle à une unification entre actes, conscience et paroles, il implique davantage les personnes dans les affaires du monde et les met devant une continuelle remise en question.

Ci dessous un schéma qui n'est là que pour aider à visualiser. Il me semble que l'actualité permettra à chacun de se faire une idée concrète de ce que ce schéma fondamental recèle.

personnification1/ Le mouvement de personnification s’établit dans un équilibre entre intériorité et extériorité d’une part, et entre ancien et nouveau d’autre part :

- Intériorité/extériorité :

- l’intériorité se situe dans la capacité à prendre le recul nécessaire et accueillir l’Homme (soi-même et les autres) pour ce qu’il a de mystérieux et comme être d’une dignité inconditionnelle et incompressible.  

- L’extériorité  est la capacité à s’engager dans le monde pour le transformer et mieux le comprendre.

L’excès d’intériorité  est caractérisé par un détachement du monde. Entendu par détachement du monde l’idée de se situer « au-delà » du monde, ou « au dessus » ; une appartenance à l’au-delà qui serait dans le même temps un rejet du monde réel et de sa valeur.

Il peut paraître étrange de parler d’excès d’intériorité. Nous entendons ici par excès, une déviation de l’intériorité qui couperait du monde et serait symptomatique d’une fuite du monde réel.

flickr-mediation-earth-in-color-ccP.S : Notons que le contemplatif, même s’il est reclus dans un territoire « en dehors du monde » se situe, non pas dans un excès d’intériorité mais au centre du schéma, dans la mesure où il se sent profondément et intimement solidaire et au service du monde et qu’il reconnaît sa dimension incarnée (la règle monastique intègre la dimension d’une vie quotidienne et d’un  travail artisanal et manuel).

 L’excès d’extériorité est caractérisé par l’insatiabilité. Il s’associe à une image restrictive de l’homme considéré comme modélisable.

flickr-eye-see-cc

« La saturation de tout ce qui est « nécessaire » est certainement une source de bonheur qu'il ne faut pas sous-estimer; mais au-delà, l'homme intérieur pose ses exigences que nul bien extérieur ne peut apaiser.  Et moins on écoute cette voix, parce qu'on est à la chasse des splendeurs de ce monde, plus l’homme intérieur devient la source de désagréments et de malheur, incompris au sein de conditions de vie qui permettraient d'envisager tout autre chose.(...) Personne ne s'étonne de son insatiabilité, (...) ce dont souffre l’occidental et il n’a nul repos tant qu’il n’a pas contaminé le monde entier de l’agitation de son désir.

Trop de gens encore cherchent en dehors d’eux-mêmes ; les uns croient au leurre de la victoire et de la force victorieuse ; d’autres aux traités et aux lois ; d’autres encore au renversement de l'ordre établi. En trop petit nombre, quelques-uns cherchent en eux-mêmes, dans leur être psychologique.

C'est en tenant compte des exigences des mondes interne et externe, et, pour mieux dire, en assumant leur conflit, que s'esquisseront les profils du possible et du nécessaire »

« Chacun a un sentiment de ce qui devrait être, de ce qu’il devrait être. Ne pas tenir compte de cette intuition, s’en écarter et s’en éloigner, c’est faire fausse route, c’est s’engager dans la voie de l’erreur et, à plus ou moins long terme, déboucher dans la maladie ».
                                      C.G Jung  (L’âme et la vie - livre de poche -p.323/324)

* Les excès d’intériorité ou d’extériorité sont illusoires ; ils conduisent à une dépersonnification.

L’excès d’extériorité, par le vide intérieur qu’il induit, peut conduire à se fabriquer des « Erzatz » d’intériorité qui aboutissent à la même dérive fusionnelle. Lorsqu’on atteint les excès, les dérives se rejoignent et s’entretiennent (symbolisé par l’ellipse dans le schéma). Par exemple, l’utopie scientifique et l’utopie syncrétique peuvent se compléter.

* Il ne s’agit en aucun cas de condamner l’extériorité en soi. La connaissance scientifique ainsi que les progrès techniques sont indispensables et font partie du processus d’évolution. C’est l’excès qui est mauvais ainsi que l’absence d’équilibre avec l’intériorité. Les technologies sont des vecteurs. L’utilisation, la place des technologies ainsi que les progrès de la connaissance scientifique ne dispensent pas des questions philosophiques et éthiques.

* Dans la mesure où la nature n’est pas insatiable, l’excès d’extériorité et l’insatiabilité qui le caractérise doit forcément faire face à un moment ou un autre à une limite. Les quelques repères sur notre temps, étudiés en première partie laissent à penser que cette limite est bientôt atteinte.

* Le mouvement de personnification, celui qui permet une union de centre à centre et renforce l’unicité de la personne et la communion, est situé entre ces excès. Intériorité et extériorité ne sont pas des domaines séparés.

C’est l’équilibre entre intériorité et extériorité qui permet la croissance. Il ouvre la voie à l’acceptation de ce qu’on est, de tout ce qu’on est, dans sa grandeur ainsi que dans sa dépendance et ses faiblesses.

- Ancien/nouveau : c’est l’axe de croissance. La croissance ne se coupe pas des racines mais s’en nourrit.

La capacité à intégrer à la fois l’ancien et le nouveau réclame une décision dans un acte libre : croire ou non à la vie ; opter ou non pour la vie. Les deux excès parient sur « le non sens » de la vie et sont sous l’emprise de  la peur.

L'acceptation du nouveau vivifie la tradition, approfondit son sens tandis que la lecture de la tradition dans le refus du nouveau se sert de la tradition pour refuser la sève de la vie, tout ce qui demande à se révéler.

Le sectarisme et l’intégrisme ne voient de sens que dans ce qui est passé ; les utopistes ne voient de sens que dans ce qui viendra ; les uns comme les autres ne se considèrent, ni intégristes, ni utopistes. L’accueil du nouveau pour les premiers, ou de l’ancien pour les seconds reviendrait pour eux à se remettre complètement en question et faire face, à leur vérité, leur conscience, leurs blessures.

L’accueil de l’ancien et du nouveau permet de participer au mouvement de la vie dans un processus continu et fait passer de l’utopie à l’Espérance.

Cette capacité n’exclut pas d’éventuelles ruptures et profondes remises en question au sein même du processus continu. Toutefois, ces remises en questions sont en général une réaction à des dérives qui voient leur origine dans l’incapacité à se situer dans cette continuité mûrie au fil du temps. Une rupture qui entendrait rejeter la dérive et l’ensemble de la tradition est donc suspecte.

personnification2/ Aller vers le mouvement de personnification (= se situer au centre du schéma) c’est forcément se mettre en mouvement pour une démarche de vérité. C’est le chemin de croissance personnelle et c’est aussi le point de passage pour une croissance globale de l’humanité. Cette proposition fonctionne aussi dans l’autre sens : la croissance globale de l’humanité et la croissance de l’univers passent forcément par un chemin de personnification.  La marche vers le centre du schéma (mais rappelons que ce schéma n’est qu’une aide pour visualiser) est une marche vers une conscience adulte majeure.

3/ L’Homme est fait pour l’Amour et la relation : l’intériorité intégrée à la marche du monde (c’est-à-dire, qui accueille la réalité du monde, s’en solidarise et ne le rejette pas) est celle qui permettra que soient prises les mesures nécessaires pour un meilleur fonctionnement de celui-ci. 

Autrement dit : on ne peut transformer le monde de manière harmonieuse sans une démarche du coeur. On ne peut s’y soustraire : toutes les connaissances, les méthodes, les programmes, les lois n’y suffiraient pas, et ce, pour la simple raison que sans une démarche d’intériorité et de recherche de vérité, ils ne témoigneraient que d’une fuite.

La personnification est une démarche de conscientisation et de confrontation. Et la confrontation est elle-même une démarche non-violente...

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